Il faut garder à l'esprit que les constructions diffèrent selon les régions et la facilité ou non à extraire de la pierre. Tout le monde n'est donc pas logé à la même enseigne. L'atomisation politique a également atomisé les centres de productions et les gains de productivité induits par l'appartenance à un grand ensemble politique qu'était par exemple l'empire romain. Il était plus simple pour l'empire de créer des carrières que pour un petit seigneur franc du limousin.
La question des matériaux utilisés est liée étroitement à la stabilité politique, ou l'instabilité. La construction d'un donjon de pierre ou le renforcement d'une motte castrale demandait un effort financier considérable ainsi qu'un effort temporel. C'est avec la stabilisation politique et l'installation durable du maillage féodal que peut s'établir à nouveau (après les grands projets carolingiens) des projets de construction en pierre qui prennent 10, 20 40 ans sur 1 à 3 génération. Enfin les risques politiques, le contrôle aléatoire de l'espace qui fait la part belle aux routiers et autres brigands, focalise l'utilisation des pierres sur les édifices militaires, défensifs, les lieux de pouvoir. Les pierres sont utilisées par ceux qui ont les moyens de les extraire, et le sont en priorité pour sauver les âmes, les corps, et les intérêts économiques...!
Les constructions en pierre ne s'arrêtent pas avec la chute de l'empire. Mais l'instabilité politique empêche le contrôle durable des espaces par des royaumes stables, pouvant s'appuyer sur un tissus économique fort et ainsi financer de grands projets de construction. Je rappelle à votre mémoire que de la basilique romaine en marbre à la cathédrale de calcaire en passant par la chapelle de granit, les bâtiments religieux, dès qu'ils atteignaient une certaine taille ou abritait les restes d'un saint fameux, était construits en pierre, et le changement de locataire ne signifiait après tout pas forcément changement de foi...!
L'habitat franc du Nord de la France devait se rapprocher de l'habitat gaulois, avec une éventuelle fortification des villes et l'édification progressive de chapelles en pierre dans les gros villages (de très nombreuses chapelles carolingiennes ont été détruites aux XIème et XIIème siècle avec l'essor économique pour construire du neuf), et celui du sud devait mélanger murs de pierres sèche dans certaines régions et toits de chaumes, ou de pierres plates...
Impossible de généraliser, mais impossible aussi que le savoir gallo/gréco/romain ait disparu d'un coup. Mais un peu partout le manque de moyen a empêché le maintien de savoirs traditionnels, et favorisé le développement de nouveaux, comme le stuc qui remplace la sculpture en ronde-bosse. (Le béton, l'acier et le verre qui remplace la pierre trop onéreuse...) Le moyen-âge est un temps de mutation ou l'homme réorganise en profondeur sa société en se ré appropriant les technique de l'ancien monde, et en créant les siennes. La route inhabituelle quoi...! :lol!:
Les centres de pouvoirs d'autrefois sont les villes d'aujourd'hui, l'homme n'avait pas choisis ces emplacements par hazard. Le problème est que sur les centres burgondes, wisigoths, francs, ou l'on devait certainement trouver de l'habitat mixte (bois/pierre) s'est rajouté 15 siècles d'occupation. Et que l'homme médiéval, peu féru d'archéologie, semble adorer casser du mérovingien ou du carolingien (qui devait leur apparaître comme nos bâtiments moches des années 60) pour bâtir du neuf, du plus pratique, du plus grand, du plus solide avec les progrès de la poliorcétique.